Le capitaine de frégate François de Plas est à la fois officier de marine et jésuite. Entre 1851 et 1858, il commande deux missions de surveillance de la mer de Chine. La première le conduit à bord de la corvette à vapeur «Cassini». Il découvre Hong Kong.
En 1888, le Commandant de Plas meurt à Brest. Sa disparition crée un vif émoi parmi les officiers de marine et chez les jésuites. Après 45 ans de carrière dans la Marine et dans la Compagnie de Jésus, l’homme est salué comme un exemple. Le Révérend Père Mercier entreprend alors sa biographie. En réunissant des lettres du marin adressées à sa mère et des rapports de l’officier à sa hiérarchie, l’auteur compose le portrait d’un homme à la fois droit et sensible.
Début octobre 1851, le «Cassini» arrive à Hong Kong. Le marin y repère immédiatement «vingt-trois navires de commerce et deux bâtiments de guerre, une corvette et un brick». Puis il s’attarde sur le paysage qui s’offre à lui : «Hong Kong, vu de la rade, présente un aspect très pittoresque. Cette petite île ne donnait autrefois asile qu’à de pauvres familles de pêcheurs chinois ; elle possède maintenant près de quarante mille habitants. La ville de Victoria, fondée depuis dix ans à peine, au moment de l’occupation des Anglais, renferme déjà plus de dix mille habitants. Elle est située sur le penchant d’une haute montagne, au pied de laquelle on aperçoit de fort belles maisons. La grande rue, sur le bord de la mer, dans le quartier européen, est formée des deux côtés de vastes magasins entrecoupés de distance en distance par de véritables palais. La rade est sûre, le port profond, en sorte que Hong Kong, malgré l’insalubrité de son climat en été, aura bientôt ruiné le commerce de la colonie portugaise de Macao, île voisine et rivale.».
François de Plas continue à naviguer entre Macao et Hong Kong. Il reçoit parfois des nouvelles de France où les dérives monarchiques de Louis-Napoléon Bonaparte inquiètent. Quelques mois plus tard, il raconte que la proclamation de l’Empire est accueillie sans enthousiasme par l’équipage. Lui est ouvertement favorable à ce retour d’un pouvoir fort. Il déplore au passage la situation en Chine, en proie aux révoltes contre les Qing : «La Chine me paraît tout aussi malade que notre pauvre France». Sa position est encore bien plus claire lorsqu’il reçoit à bord un diplomate français dont il tait le nom mais qui doit être Bourboulon, en poste à Macao. «J’ai une conversation assez vive avec le nouveau ministre (plénipotentiaire) qui me paraît être républicain fanatique. Il réclame l’émancipation de la pensée, la liberté illimitée de la presse… Que sais-je ? Je suis destiné à l’avoir à bord ; ma position vis-à-vis de lui sera nécessairement embarrassante ; enfin, Dieu y pourvoira». Les accrochages se multiplient effectivement. La République et l’Empire s’affrontent aussi en Mer de Chine !
L’un des plus beaux souvenirs du marin jésuite à Hong Kong semble être la célébration de la messe pour la Sainte-Barbe dans son bateau ; il ne peut s’empêcher toutefois de regretter les sarcasmes de ses hommes qui ne sont guère pieux. Il est assez peu friand de toutes les mondanités ; les repas chez l’agent consulaire Haskelt finissent systématiquement en houleuses conversations politiques… De Plas est bien plus à l’aise avec le protocole lorsqu’il rend visite au gouverneur anglais, au contre-amiral de Sa Majesté et, surtout, lorsqu’il est reçu par les Missions Etrangères.
En mai 1853, le «Cassini» est de retour dans les eaux de Hong Kong. Cette fois, le climat est moins cordial avec les autorités. «Le caractère d’imprévu que portent tous les actes de Louis-Napoléon me fait craindre qu’aujourd’hui, on se batte en Europe». Le conflit contre les Anglais est perçu comme imminent ; c’est le branle-bas de combat sur la corvette, les hommes sont prêts à ouvrir le feu contre la «Cléopatre» qui garde le port. Les nouvelles d’Europe arrivent lentement et partiellement. Prudent, De Plas fait mouiller son navire près de Macao. Rien ne se passe… pour cette fois.
Début octobre 1851, le «Cassini» arrive à Hong Kong. Le marin y repère immédiatement «vingt-trois navires de commerce et deux bâtiments de guerre, une corvette et un brick». Puis il s’attarde sur le paysage qui s’offre à lui : «Hong Kong, vu de la rade, présente un aspect très pittoresque. Cette petite île ne donnait autrefois asile qu’à de pauvres familles de pêcheurs chinois ; elle possède maintenant près de quarante mille habitants. La ville de Victoria, fondée depuis dix ans à peine, au moment de l’occupation des Anglais, renferme déjà plus de dix mille habitants. Elle est située sur le penchant d’une haute montagne, au pied de laquelle on aperçoit de fort belles maisons. La grande rue, sur le bord de la mer, dans le quartier européen, est formée des deux côtés de vastes magasins entrecoupés de distance en distance par de véritables palais. La rade est sûre, le port profond, en sorte que Hong Kong, malgré l’insalubrité de son climat en été, aura bientôt ruiné le commerce de la colonie portugaise de Macao, île voisine et rivale.».
François de Plas continue à naviguer entre Macao et Hong Kong. Il reçoit parfois des nouvelles de France où les dérives monarchiques de Louis-Napoléon Bonaparte inquiètent. Quelques mois plus tard, il raconte que la proclamation de l’Empire est accueillie sans enthousiasme par l’équipage. Lui est ouvertement favorable à ce retour d’un pouvoir fort. Il déplore au passage la situation en Chine, en proie aux révoltes contre les Qing : «La Chine me paraît tout aussi malade que notre pauvre France». Sa position est encore bien plus claire lorsqu’il reçoit à bord un diplomate français dont il tait le nom mais qui doit être Bourboulon, en poste à Macao. «J’ai une conversation assez vive avec le nouveau ministre (plénipotentiaire) qui me paraît être républicain fanatique. Il réclame l’émancipation de la pensée, la liberté illimitée de la presse… Que sais-je ? Je suis destiné à l’avoir à bord ; ma position vis-à-vis de lui sera nécessairement embarrassante ; enfin, Dieu y pourvoira». Les accrochages se multiplient effectivement. La République et l’Empire s’affrontent aussi en Mer de Chine !
L’un des plus beaux souvenirs du marin jésuite à Hong Kong semble être la célébration de la messe pour la Sainte-Barbe dans son bateau ; il ne peut s’empêcher toutefois de regretter les sarcasmes de ses hommes qui ne sont guère pieux. Il est assez peu friand de toutes les mondanités ; les repas chez l’agent consulaire Haskelt finissent systématiquement en houleuses conversations politiques… De Plas est bien plus à l’aise avec le protocole lorsqu’il rend visite au gouverneur anglais, au contre-amiral de Sa Majesté et, surtout, lorsqu’il est reçu par les Missions Etrangères.
En mai 1853, le «Cassini» est de retour dans les eaux de Hong Kong. Cette fois, le climat est moins cordial avec les autorités. «Le caractère d’imprévu que portent tous les actes de Louis-Napoléon me fait craindre qu’aujourd’hui, on se batte en Europe». Le conflit contre les Anglais est perçu comme imminent ; c’est le branle-bas de combat sur la corvette, les hommes sont prêts à ouvrir le feu contre la «Cléopatre» qui garde le port. Les nouvelles d’Europe arrivent lentement et partiellement. Prudent, De Plas fait mouiller son navire près de Macao. Rien ne se passe… pour cette fois.
FD.
Gravures tirées de "La campagne du Cassini" dans les mers de Chine, par le RP Mercier, 1889.
Remerciements à M. Yves Azémar et son inépuisable librairie d'ouvrages anciens sur l'Asie, 89 Hollywood road - Hong Kong.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire