jeudi 30 octobre 2008

La communauté française de Hong Kong en 1919

En 1919, près de 80 ans après la fondation de Hong Kong et 60 ans après l’ouverture du consulat de France, moins d’une centaine de Français vivent à Hong Kong. Ils travaillent dans des maisons de commerce françaises ou oeuvrent au sein d’institutions religieuses. Administrateur de cette communauté, du fait de ses fonctions, le consul de France de l’époque fait le point…
Le consul de France est souvent considéré comme le «chef de la communauté française» de sa circonscription. Depuis l’apparition de l’institution consulaire, à l’époque des croisades, le consul a en effet comme missions l’administration mais aussi la protection de ses compatriotes. Rattachés à la Marine par Colbert en 1669, les consuls dépendent du ministère des Affaires étrangères depuis la Révolution. Il incombe au consul de bien connaître «ses» Français et de transmettre régulièrement au ministère des Affaires étrangères un rapport sur la communauté française dont il a la charge. Au fil des décennies, ces véritables «instantanés» nous permettent de suivre les évolutions de la population française vivant à Hong Kong. Ainsi, le 24 décembre 1919, le consul de France, Ulysse-Raphaël Réau, envoie à Paris une de ses dernières dépêches de l’année, qu’il consacre au recensement de ses administrés.
La «colonie française de Hong Kong», comme la nomme le consul, se monte à 85 personnes. Le chiffre peut paraître modeste, Hong Kong comptant alors environ 600 000 habitants, dont 13600 «non-chinois», mais le consul note aussi que «le chiffre de nos nationaux a plus que doublé depuis 1914 et que six firmes nouvelles ont été créées». La Première guerre mondiale n’a donc pas réduit les effectifs de la communauté française de Hong Kong, comme ce sera le cas vingt ans plus tard, en 1940.
La moitié des membres de la communauté française travaille au sein d’une «vingtaine de maisons françaises» qui, «d’une manière générale […] sont prospères». Les conséquences économiques du conflit qui vient de se terminer en Europe se font cependant sentir et le consul relève que les compagnies françaises qui «se livrent au commerce d’importation et d’exportation souffrent des conditions difficiles que leur créent la hausse du dollar, la cherté du fret et, en France, la stagnation de notre industrie». Problème économique, récurrent, des débouchés, des capacités de l’offre et des évolutions du taux de change: «leurs commandes d’articles français ne peuvent être exécutées et, d’autre part, leurs exportations de produits chinois vers la France sont arrêtées par le change élevé du dollar».
Six firmes françaises ont cependant pu s’installer à Hong Kong pendant la guerre, dont une banque, la Banque Industrielle de Chine, une compagnie de navigation, Lapicque et Cie et des sociétés de commerce, dont la maison Lily, qui importe des articles de mode. Ces six nouvelles sociétés françaises s’ajoutent à la douzaine de sociétés qui existaient avant 1914, dont la Banque de l’Indochine, pendant quarante ans seule banque française à Hong Kong et les Messageries Maritimes, installées dans la colonie depuis ses débuts. Outre la banque et la navigation, illustrées par ces deux établissements réputés, les Français de Hong Kong sont présents dans d’autres secteurs d’activité. On relève ainsi l’énergie, avec les Charbonnages du Tonkin, la Société d’Oxygène et d’Acétylène et Ricou et Cie , la photo avec Pathé Frères, la bijouterie et l’horlogerie, avec Ulmann et Sennet Frères, l’hôtellerie avec Astor House, la mode avec Flint et enfin l’import-export avec Sennet Frères.
A la quarantaine de Français travaillant au sein de ces maisons françaises et à leurs familles, s’ajoute une trentaine de Pères, Frères et Sœurs oeuvrant au sein des institutions religieuses françaises. Le consul de France recense la Mission Catholique, la Procure des Missions Etrangères de Paris, l’Imprimerie de Nazareth et les établissements fondés par les Sœurs de Saint Paul de Chartres, l’hôpital, l’orphelinat et le couvent.
Il y a 90 ans, la communauté française de Hong Kong, malgré sa taille réduite, est donc déjà à l’image de ce qu’elle deviendra après la Seconde guerre mondiale, dynamique et active dans de multiples secteurs liés au rôle de Hong Kong comme carrefour de l’Asie.

CR.

Sources : Archives du ministère des Affaires étrangères, Nantes – «Historical and statistical abstracts of Hong Kong 1841-1930». Crédits photos : HKMM, Crédit Agricole.


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